Livre de l’abbé Picon

De quoi s’agit-il ?

L’abbé Joseph Augustin Picon fut curé à Montlaux de 1851 à 1892, date de son décès. Il nous a laissé un ouvrage manuscrit très riche intitulé « Notes pour servir à l’histoire de Montlaux » qui a été récemment retrouvé.

Plusieurs Moularain(e)s, et Moularain(e)s de cœur, ont travaillé ensemble à la publication de cet ouvrage, depuis la transcription du manuscrit jusqu’à la mise en page et à l’impression sous forme de livre. Un tirage préliminaire a été effectué en septembre 2023, puis un premier tirage définitif en novembre de la même année.

Pour l’instant, seule la mairie de Montlaux en assure la distribution – il suffit de la contacter pour obtenir un exemplaire au prix de 20 €.

A gauche le manuscrit original, et à droite la transcription publiée – cliquer pour agrandir.

Le manuscrit

Les lecteurs du livre peuvent comparer la transcription avec le manuscrit, lui-même étant accessible en ligne sous la forme de ce fichier (cliquer pour accéder). Il s’agit cependant d’une numérisation fine qui est relativement lourde (près de 900 Mo) – une version beaucoup plus légère (donc moins fine) est aussi disponible. Utilisez la commande de téléchargement, en haut à droite de la page. La pagination du manuscrit est reprise dans le livre pour ceux qui voudraient comparer l’original et la transcription.

Extrait du manuscrit – cliquer pour agrandir.

La carte

Enfin, très utile pour accompagner la lecture, une carte des lieux (cliquer pour accéder) mentionnés dans l’ouvrage est accessible qui permettra au lecteur de se repérer. Une bonne partie de cette toponymie reste toujours d’actualité même si les noms ont pu évoluer, et d’autres ont été retrouvés qui ne sont plus familiers. Certains lieux évoqués par l’auteur font l’objet d’une localisation hypothétique – ils sont aussi représentés dans cette carte, au meilleur de notre connaissance.

Capture d’écran de la carte – cliquer pour agrandir.

Mot de la maire

Le livre s’ouvre sur un mot de la maire de Montlaux, qui donne son point de vue sur la démarche.

Montlaux a une histoire.

On le sait, et on sait qu’elle est au moins millénaire. Mais l’on sait aussi que les traces de l’histoire ancienne des petits villages au travers des siècles sont rares et souvent difficiles à décrypter.

Ce que nous offre l’abbé Picon, puis tous ceux qui ont contribué à exhumer, toiletter et documenter son texte, c’est un relais de l’histoire, une pierre au milieu du gué. A mi-chemin entre le Moyen Âge et notre époque moderne, l’auteur a pu faire une lecture des textes anciens à un moment où les usages reflétaient encore les vieilles pratiques, aujourd’hui oubliées. C’est une sorte de périscope qui livre une image partielle mais très lisible, et tout à fait réaliste, de la vie dans notre village (et alentour) des temps passés.

En ce sens, ce document est à mes yeux d’une très grande valeur. Avec ce travail éditorial, nous posons une autre pierre dans la grande rivière où coule le temps. Ce livre sera conservé et lu pendant des siècles, jusqu’à ce qu’un historien du futur, conscient des références alors datées qu’on y trouvera, veuille à son tour transposer le texte pour les lecteurs de son époque.

C’est cette perspective, ce vertige peut-être, que je suis heureuse de proposer au nom de notre commune, Montlaux. Nous passons le relais, en somme, et nous en sommes fiers.

Camille Feller, septembre 2023

Aperçus

Les Seigneurs.

Si l’on crie tant aujourd’hui contre les Seigneurs, si on s’élève avec tant d’audace contre l’autorité et la puissance qu’ils avaient autrefois, c’est que l’on ne sait pas se reporter par la pensée à l’époque où ils vivaient, ce qui est de rigoureuse nécessité, pour faire la juste appréciation de leur manière de faire. Lorsque il est question d’eux, on ne sait mettre en avant que leurs injustices ou les abus coupables auxquels ils donnaient lieu. Un certain nombre, il est vrai, n’était pas irréprochable ; mais la majorité méritait-elle ces reproches de tous genres qu’on ne cesse de leur adresser ?… Et ces bons conseils qu’ils donnaient à tout le monde ; et ces secours de toute espèce qu’ils prodiguaient avec tant de générosité à tous les malheureux ; et la justice qu’ils rendaient gratuitement ; et ce sentiment de douce fraternité qu’ils inspiraient à leur population ; et ces services éminents et nombreux qu’ils rendaient aux habitants dans les moments de trouble et de désolation ; et cette vie généralement édifiante qui était pour tous une raison de bien faire, tout cela n’est donc rien !

Pour nous, nous aimons la liberté autant que nous haïssons le despotisme, mais quoique (sic) on en dise, nous préférerions le seigneur d’autrefois avec ses nombreuses qualités, quoique parfois un peu tyran, à cette triste engeance qui nous arrive aujourd’hui, et que tout le monde, avec raison, regarde avec un air d’étonnement. Et pourquoi ? Parce qu’il n’y a généralement dans cette classe, ni sentiments religieux, ni affection pour le peuple. Aussi qu’arrive-t-il ? C’est que le peuple en est déjà infiniment plus fatigué qu’il ne l’était de la noblesse en 1793. L’époque de 1851 l’a prouvé clairement, et l’avenir le prouvera mieux encore, à moins que le Bon Dieu n’éclaire ceux qui ont des yeux et ne voient pas, des oreilles et n’entendent pas.

Pages 69-70 de la transcription

Quartier de Villerme

A l’époque d’un double assassinat commis au moulin de Poulone, les gendarmes s’étant emparés de l’assassin, le conduisaient, lorsque étant arrivés à Villerme, ils jugèrent à propos de le fusiller. De là est venu à ce quartier la dénomination de mort de l’homme.

Page 149 de la transcription

Amusements

Naturellement honnêtes, doux, paisibles et bons, les habitants de Montlaux aiment peu les jeux bruyants ; la partie aux boules ou aux cartes, voilà leurs amusements ordinaires.

Mais en revanche, si les circonstances le permettent et qu’ils puissent organiser une partie de bal, alors leur cœur s’épanouit, ils sont gais et heureux dans toute la force du terme. Qui, tel ne sortirait pas de chez lui, si vous l’invitiez à toute autre chose, qui abandonnera tout, même une occupation pressante, un voyage arrêté, pour ne pas manquer à l’heure de la réunion.

Ce goût s’est manifesté d’une manière remarquable à l’époque où la paroisse était desservie par bis . En effet, chaque fois que le Dimanche il y avait à Montlaux la messe de onze heure (c’est-à-dire, la dernière) on était sûr qu’il y avait bal à la sortie de l’église. Aussi avons nous souvent entendu des per-sonnes des environs se dire, les lundis de Noël et de Pâques etc : allons un peu à Montlaux aujourd’hui, il y a la 2e messe, on danse !

A quoi tient cette affection particulière des habitants pour ce drôle d’amusement ? C’est ce qu’il est difficile d’expliquer. Mais ce qui est certain, c’est que les pères en léguant cette affection à leurs enfants, l’avaient eux-mêmes reçue de leurs ancêtres. Cette manière de se divertir dans le pays, date de très loin. Ce qui le prouve c’est que quand le vieux village existait encore, il y avait un endroit qui lui était spécialement consacré, et que l’on appelait pour cela le Bal-aire.

Nul doute que les gens ne croient pas à tout le danger que court la moralité dans ces circonstances, mais le danger n’en est pas pour cela moins grand, ni moins déplorable. Que faire alors ? Prier et attendre. Du temps et de la grâce, que les yeux soient éclairés, que l’illusion disparaisse. Mais ne pourrait-on pas ?… Ah ! non, car ce serait alors le cas de vous dire : vous voulez guérir trop vite le malade, vous allez, au contraire, l’irriter, aggraver sa position et rendre votre mission auprès de lui tout-à-fait infructueuse.

Daigne le Seigneur accorder à ce peuple d’ailleurs très bon, charitable et juste, tout le bien que nous lui souhaitons, toutes les grâces qu’un pasteur des âmes a droit de demander pour ses chères ouailles.

Pages 61-63 de la transcription

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